Perinaldo (Imperia), 6 août 2017

Juillet août septembre 2017

Bulletin of the Piotr-Tchaadaev Association

Il faut savoir prendre de la distance, ou de la hauteur, entend-on souvent proposer comme recette de sagesse à visée universelle. On n’est peut-être pas si loin des lessives qui lavent plus blanc que blanc et autres tornades blanches.

Et pendant ce temps, on mesure les records de vitesse du vent de différents ouragans (Le Monde, 07.09.2017), comme on comparait, jadis et naguère, les records de vitesse sur rail dans notre beau pays… Le nouveau ministre français de la transition (surtout ne précipitons rien…) écologique, Nicolas Hulot, a sans doute bien raison de dire : « Le pire est devant nous. Il y a un moment où on touche les limites, où l’événement nous dépasse » (Le Monde, 08.09.2017). « Ce qui est l’exception dans beaucoup de domaines, y compris chez nous la canicule, va devenir parfois la norme ». Et encore : « A force de nier la réalité, elle nous rattrape et on n’est pas forcément prêt ». Ne jetons pas la pierre à une des figures les plus populaires de l’écologie actuellement en France, mais reconnaissons quand même le très haut degré d’impréparation, en tout cas de notre pays. La canicule meurtrière de 2003 date de quatorze ans. Qu’a-t-on vu concrètement de fait depuis – au- delà des certes très utiles « plans canicules » -, avec trois présidents différents ? Et on a vu les records de température s’accumuler tout l’été à la surface de nos écrans, pour disparaître aussitôt dans le brouhaha d’une actualité toujours rebondissante et comme indifférenciée, du people au terrorisme. Pas besoin d’être grand clerc pour chercher quelques évolutions sur le net : la hausse des températures estivales, surtout nocturnes, est très facile à retracer pour ces dernières années.

Et toujours cette effrayante/effarante et scandaleuse abstention d’agir de la part des autorités. On n’a semble-t-il jamais parlé, par exemple, de circulation alternée dans le Sud de la France cet été. Tout se passe comme si on avait déjà donné raison aux climato-sceptiques ou plutôt à ceux qui pensent que les carottes sont de toute façon cuites, alors à quoi bon… L’Editorial du Monde (08.09.2017) le dit en ces termes : « Cela tient de l’ironie et de la catastrophe : en la personne de Donald Trump, les Américains ont élu un président climatosceptique au moment où les manifestations du réchauffement deviennent une plaie ouverte pour eux-mêmes. »

Le paisible village ligure de Perinaldo est le lieu de naissance de l’astronome Giovanni Domenico Cassini (1625-1715), qui fut sous Louis XIV le premier directeur de l’Observatoire de Paris. Une sonde portant son nom* explore l’espace depuis son lancement en 1997 et va s’abîmer sur Saturne le 15 septembre prochain. Tout un symbole, sans doute…

Nous rejoignons ici la question de la hauteur et de la distance : le constat sur l’évolution du climat et l’absence de réaction adaptée de la majorité de l’humanité, y compris et surtout de la fraction qui prétend la diriger, semble sonner le glas d’une longue et (malgré tout…) fructueuse évolution, notamment dans l’acquisition des savoirs. Nous en serions arrivés au moment d’une liquidation/liquéfaction générale, où aucun savoir ne peut plus barrer la route à la catastrophe en cours, non pas parce qu’il n’existerait pas, mais parce que personne ne veut réellement le mettre en œuvre.

* http://www.lemonde.fr/sciences/article/2017/09/11/cassini-sa-mission-suicide-sur-saturne_5184037_1650684.html


Il Volantino Europeo n° 57

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