Un des derniers voyages en avion « d’avant » : Zürich Budapest, 961 km/h

Numéro spécial “Divan” online 2020

Janvier – février – mars 2020

Bulletin internautique de l’Association Piotr-Tchaadaev

L’épidémie – que dis-je, la pandémie – en cours devrait, selon certains, nous amener à remettre les pendules à l’heure, notamment pour tout ce qui a trait à la santé, à l’environnement, à l’énergie et bien sûr aux inégalités. Chacun se devant de balayer devant sa porte, la France (et notamment son gouvernement et son Président) est régulièrement appelée à la repentance depuis l’intérieur même de ses frontières (appels, pétitions, opinions…). Si notre pays (mais d’autres aussi) applaudit chaque soir au balcon ses soignants, élevés au rang de héros (ce dont certains ne veulent d’ailleurs pas du tout), si des formes de solidarité se sont fait jour, le tableau (ou patchwork) d’ensemble n’est évidemment pas des plus réjouissants, que ce soit pour l’actualité ou pour « l’après ». Pour être très simple, les tenants de la reprise économique s’opposent assez régulièrement aux experts en santé publique. De Chi va piano va sano, plus vrai que jamais, à la phrase devenue célébrissime « Il faut agir aussi vite que possible mais aussi lentement que nécessaire » du Conseiller fédéral (suisse) Alain Berset, nous ne manquons pas de devises de circonstance pour accompagner notre route si incertaine. L’humour – fût-il parfois noir – a évidemment aussi sa place dans la pandémie, ce qui est bien la moindre des choses.
A ce cortège de commentaires, qui s’enrichit tous les jours, s’ajoutent des figures aussi inévitables que dérangeantes : les polémiques (scientifiques et surtout politiques) mais aussi les fake-news, qui rendent souvent bien difficile la construction d’un jugement éclairé pour soi-même.
Quoi qu’il en soit, pour le dire trivialement, nous ne sommes pas sortis de l’auberge et il faudra sans doute encore de longs mois pour comprendre comment cette épidémie (imprévue mais prévisible, en tout cas anticipée) a pu naître et se propager à une telle vitesse, et arriver à la contrôler, après tous les ravages sanitaires qu’elle a occasionnés, des évolutions mortelles à la contagiosité des personnes asymptomatiques. Et d’encore plus longs mois pour retrouver – ou non – « la vie d’avant », vilipendée par les uns ou objet d’amers regrets pour les autres.
Qu’on nous permette de souscrire ici à une dernière citation, due à Jean-Yves Le Drian : « Ma crainte, c’est que le monde d’après ressemble au monde d’avant, mais en pire » (Le Monde, 20.04.2020). Certaines déclarations intempestives et certaines mesures liberticides, que les autorités (en se contredisant au besoin) ont toujours justifiées par l’urgence sanitaire, ne laissent pas d’inquiéter si elles n’étaient pas ultérieurement amendées ou tout simplement annulées, ce qui est loin d’être acquis. Comment le virus, organisme a priori sans intention, devient à son tour « l’allié objectif » des dérives autoritaires, est une des questions qui nous attendent avant même la sortie de la crise.


Il Volantino Europeo n°66

Janvier – février – mars 2020
Bulletin internautique de l’Association Piotr-Tchaadaev